La transmission de la baisse des taux souverains sur les conditions de financements des sociétés non financières en France

Résumé :

- Les conditions d’emprunt de l’État français sont historiquement favorables avec un taux d’emprunt à 10 ans aux alentours de 1,2% début Septembre 2014

- Les évolutions des spreads de taux se transmettant aux taux des prêts accordés aux sociétés non financières (SNF), l’accès au crédit est facilité et profite à l’ensemble du tissu productif français

- La crainte d’une hausse des taux souverains fait peser un risque réel sur les capacités d’investissement des SNF

Les spreads de taux en zone euro, c’est-à-dire la différence entre les taux souverains (écart des taux par rapport au taux allemand, le bund), sont devenus significatifs depuis la crise des dettes souveraines en 2010. Depuis, des divergences sont apparues sur les taux de financements des pays cœurs (Allemagne, France) et les pays du Sud (Italie, Espagne, Portugal, Grèce) du fait d’inquiétudes accrues des investisseurs concernant le niveau de stock de dette publique rapportée à la richesse de ces pays. La crise en Europe a conduit à une hausse drastique des taux souverains dans les pays du Sud quand bien même les taux français sont restés bas  malgré une augmentation du spread entre les taux allemands et français. Mais quel pourrait être l’impact d’un nouveau resserrement des spreads sur les conditions de financement des sociétés non financières ?

1 - Une baisse du taux débiteur qui assouplit les conditions de financement des SNF

Selon une étude de la Banque de France[1] , les spreads de taux ont un impact significatif sur les conditions de financement des sociétés non financières (SNF). La transmission des niveaux des spreads aux taux débiteurs est relativement faible à court terme, mais les auteurs arguent qu’à long terme la transmission d’une hausse de 100 points de base du taux souverains se répercute intégralement sur les taux débiteurs. Par exemple, le coût du crédit s’est renchérit entre le milieu de l’année 2010 et la fin de l’année 2011, avant de décroître concomitamment (1) à la baisse des taux souverains français et (2) au resserrement des spreads des taux français et allemand depuis la fin de l’année 2012.

Cette observation supposerait ainsi que le resserrement des spreads de taux souverain actuellement observé en zone euro faciliterait un assouplissement des conditions de financement des SNF. Le taux de croissance des encours de crédit aux SNF a augmenté, atteignant un point haut en juillet 2014 à 1,8% après un taux de croissance de 0,5% en moyenne entre septembre 2012 et mars 2014.

2 – Un assouplissement généralisé à l’ensemble des crédits

La croissance des encours de crédit aux SNF s’étend aux crédits de toutes tailles. Selon les chiffres de la Banque de France, les coûts de l’ensemble des crédits aux acteurs non financiers[3] semblent être affectés à la baisse par le niveau des taux souverains.

Ces chiffres sont confortés par les études menées en début d’année par la Banque de France[4] qui notaient (1) une augmentation des crédits accordés au premier trimestre 2014 et (2) un maintien à des niveaux élevés de la demande et de l’obtention de crédits au second semestre, pour les crédits de trésorerie ou d’investissement accordés aux TPE, PME et ETI en France. Une baisse du coût global de financement est déjà observée.

Conclusion

Couplées à un regain de dynamisme des marchés boursiers et au développement de nouvelles sources de financement destinées aux PME et ETI, à l’instar de l’Initial Bond Offering[2] (IBO), les conditions de financement des SNF françaises s’amélioreraient, notamment via la baisse des taux souverains qui maintiendrait les coûts du crédit à de faibles niveaux.

Cependant, bien que les conditions soient favorables au développement du crédit, les inquiétudes sur les taux souverains français et le contexte économique pourraient brider la reprise de l’investissement des SNF.

Notes:

[1] Jean Barthélemy et Magali Marx, « L’impact de l’évolution des taux souverains sur les conditions de financement des économies française, espagnole et italienne », Bulletin de la Banque de France n°188, 2èmesemestre 2012

[2] Emission obligataire destinée aux PME et ETI

Références

- Jean Barthélemy et Magali Marx, « L’impact de l’évolution des taux souverains sur les conditions de financement des économies française, espagnole et italienne », Bulletin de la Banque de France n°188, 2ème semestre 2012

- « Enquête trimestrielle auprès des entreprises sur leur accès au crédit en France », Banque de France, 1er semestre 2014

- « Enquête trimestrielle auprès des entreprises sur leur accès au crédit en France », Banque de France, 2ème semestre 2014

Diplômé de l’Université Paris Dauphine en Economie Monétaire et Financière, Pierre-Michel Becquet est analyste à la Société Générale après avoir évolué au sein de l'AFIC comme chargé d'études économiques et financières. Ces centres d’intérêts portent sur le financement des entreprises, l’intermédiation financière et la politique monétaire.

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